Qui suis-je ? Mon parcours vers une éducation libératrice

Si je crée aujourd’hui ce blog, Grandir et apprendre autrement, c’est pour partager une conviction profonde : l’enfant est un être naturellement coopératif, intelligent, plein d’empathie, et porteur d’un projet de développement singulier. Il ne demande qu’à grandir et à prendre sa place dans la société, à condition qu’on cesse de vouloir le dresser. Et pour cela, il nous faut repenser en profondeur notre façon de l’accompagner.

Quand j’étais jeune, je voulais être anthropologue, écrivaine, poète, ou, à la rigueur, journaliste. En Terminale, je me suis jurée que je ne ferai ni du droit, ni une école de commerce.

Bref. J’ai fait du droit. Puis une école de commerce.

Après ce cursus, j’ai commencé ma vie professionnelle — toujours par défaut — dans le monde de l’entreprise. Travailler dans un cabinet de conseil en stratégie, prendre des avions et vivre à l’hôtel, a été, pour moi, une épreuve plus qu’un accomplissement. Chaque matin, en enfilant mon tailleur et en me maquillant pour “faire plus femme”, j’avais l’impression de mettre un costume de clown. Je me sentais étrangère à ce monde où l’on performe, où l’on avance en maîtrisant le langage du pouvoir, mais où l’on oublie si facilement le sens.

J’avais l’impression d’avoir gâché mon potentiel.

Adolescente, j’étais curieuse, vive, toujours avide de comprendre, avec une jolie plume et une envie de me dépasser. Étudiante, j’ai passé des années à procrastiner, à errer d’un partiel à l’autre, à vivre avec cette boule au ventre qui empêche de profiter des week-ends parce qu’on “n’a rien fait de la semaine et qu’on aurait dû travailler”. J’ai fonctionné au strict minimum pour passer d’une année à l’autre, portée par une inertie silencieuse, et un violent syndrome de l’imposteur qui me collait à la peau.

Aujourd’hui, je suis convaincue que je suis porteuse d’un TDAH, et cette révélation a apporté un éclairage plus que bienvenu à tout ce que j’ai vécu dans ma jeunesse. Mais ce neuroatypisme ne me dérangeait en rien, petite, tant que j’étais libre de suivre mes propres élans. C’est bien le cadre rigide et normatif du système scolaire et universitaire qui m’a déconnectée de mes ressources.

Après quelques années dans le monde de l’entreprise, j’ai tenté une première bifurcation vers le journalisme. J’ai repris des études à l’ESJ Lille, à l’antenne de Montpellier, en spécialisation radio. Ce passage par le journalisme m’a appris à décortiquer les discours dominants, à chercher la complexité derrière les évidences, et à donner la parole à ceux qu’on n’écoute pas. C’est aussi là, dans les coulisses bien huilées de l’information économique, que j’ai éprouvé un profond désenchantement. Derrière les débats soi-disant contradictoires, j’ai perçu les lignes rouges qu’on ne franchit pas, les récits dominants qu’on ne remet jamais vraiment en cause. Ce désenchantement a renforcé mon esprit critique — un esprit que je veux aujourd’hui transmettre aux enfants, pour qu’ils deviennent des citoyens libres, capables de penser par eux-mêmes, et bâtisseurs de paix dans un monde qui en manque cruellement.

C’est en devenant mère que le déclic a eu lieu. J’ai compris que l’éducation pouvait être un levier immense de transformation sociale. Que c’est par les enfants qu’on prépare un autre monde.

Nous avons déménagé en famille à Orgiva, en Andalousie, un haut-lieu des cultures alternatives en Espagne. C’est là que j’ai co-créé et dirigé ma première école Montessori. Et en même temps, j’ai découvert l’Instruction en famille, le unschooling et ma première école démocratique – le Kids space de Beneficio. C’était un endroit complètement dingue, au milieu des eucalyptus, des tipis, et au bord d’un ruisseau, en forme de dôme fait de bric et de broc, où une quinzaine de mômes plutôt anglophones de 3 à 12 ans environ vivaient leur meilleure vie, dans la liberté la plus totale. Et principalement, ils avaient l’air extrêmement heureux.

J’ai voulu passer de la gestion administrative d’une école au terrain avec les enfants. J’étais déjà plutôt convertie au modèle Sudbury et aux écoles démocratiques, mais je voulais avoir des billes pour accompagner les enfants dans les apprentissages, en partant de leur motivation intrinsèque.
Rentrée en France, j’ai donc conçu et animé une classe de primaire 6-12 ans pendant quatre ans, tout en me formant à la pédagogie Montessori (diplôme AMI) et à la Communication NonViolente. J’ai vécu la puissance d’un environnement préparé, où les enfants se meuvent librement, choisissent leurs activités, développent leur concentration et leur coopération naturelle. J’ai confirmé ce que je pensais déjà : l’enfant est un être profondément relié, curieux, empathique… à condition qu’on ne le violente pas. C’était dur, j’étais insuffisante, et j’ai du apprendre à ajuster ma posture, je vous en reparlerai.

En parallèle, j’ai participé à de nombreux forums sur les écoles démocratiques, les pédagogies alternatives, et les pratiques éducatives inspirantes; j’ai aussi visité de nombreuses écoles, dont Summerhill. Ces expériences m’ont ouvert les yeux sur ce que pourrait être une société qui respecterait profondément l’enfant : une société plus libre, plus égalitaire, plus vivante.

En 2020, j’ai cofondé L’Archipel, une école démocratique pour les 6-18 ans dans la Drôme. J’y coordonne la pédagogie au sein d’une équipe extraordinaire en essayant chaque jour de concilier idéal et réalité. Nous avons aboli les devoirs, les notes, les classes d’âge, les cartables… mais pas encore toutes les contraintes institutionnelles. C’est un espace en mouvement, en recherche, en tension parfois, mais toujours vivant. Et je me sens enfin à ma place.

Créer une école, c’est aussi affronter les résistances : celles des institutions, des habitudes, et parfois des peurs parentales. C’est pourquoi je veux aujourd’hui ouvrir un espace de réflexion plus large, en ligne, pour accompagner les parents dans la déconstruction de leurs idées reçues, interpeller les acteurs institutionnels de l’éducation, et imaginer ensemble un monde éducatif radicalement différent.

Ce blog, Grandir et apprendre autrement, est né de cette urgence. L’urgence de penser autrement l’école, la famille, l’enfance. L’urgence de cesser les violences éducatives ordinaires, de faire confiance à l’élan de croissance naturel des enfants, et de leur redonner la place qui leur revient dans nos sociétés : celle d’êtres humains à part entière, et non de futurs adultes à formater.

Je rêve d’une école sans murs, d’un monde sans dressage, d’enfants libres qui deviennent des adultes lucides, empathiques et créatifs. Je rêve aussi que ce blog me permette d’en vivre, pour m’y consacrer pleinement : en proposant des formations, en partageant des ressources, en tissant un réseau d’adultes concernés qui veulent changer l’éducation pour changer le monde.

Je n’ai pas perdu ma curiosité, ni ma plume, ni mon élan. Je les ai retrouvés. Et je t’invite, à travers ces pages, à les retrouver aussi — pour toi, pour les enfants, pour un autre monde possible.

Tu me suis dans cette aventure ?

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7 Responses

  1. Merci Pauline de faire bouger les choses. Entre l’Archipel et ce blog, tu vas déjà pouvoir sensibiliser les parents à plus grande échelle.
    Identifiée TDAH récemment, je découvre seulement maintenant à 50 ans bien passés, qui je suis réellement, et comment je fonctionne… mieux vaut tard que jamais. Je comprends que je ne suis pas difficile, folle ou encore caractérielle, je suis juste différente. Et c’est une révélation que de pouvoir poser ses mots, ces explications.
    Parce que derrière… c’est 50 années de souffrances, de violences liées à l’incompréhension de mon fonctionnement.
    Alors Merci de mettre tout ceci en lumière, et de permettre une autre « éducation » des enfants dans nos pays soi-disant civilisés.
    Je te rejoins pleinement sur ce point de vue, et je relayerai avec plaisir tes futurs articles.

    Bien amicalement,
    Gaëlle 🐥🌿
    (blogs oeuf-poule-poussin & une vie en mieux)

  2. Bravo pour la création de ce blog et pour cette école pleine de sens ! Bonne continuité et je vais vous suivre avec plaisir !

  3. Bonjour Pauline et Bravo pour cet excellent, inspirant et émouvant premier article! Je suis une fervente défenseuse de l’éducation bienveillante et de redonner une place centrale, saine et humaine à ce type d’éducation de nos enfants, qui sont pour moi de véritables enseignants d’une vie plus libre et toujours connectée à notre intuition et à notre force d’amour!
    J’ai longtemps et encore aujourd’hui vécue une grande frustration de ne pas réussir à proposer une autre formule que l’école traditionnelle à mes enfants et je m’efforce de leur donner ces outils d’écoute de soi, de communication non violente et de langage du cœur (en fait c’est souvent eux qui me le rappellent😅).
    Bravo en tous cas pour ce beau parcours, cela me laisse rêveuse. Merci d’oser élargir et rendre accessible tes compétences pour qu’enfin les consciences s’éveillent de plus en plus à cet accompagnement et cette relation précieuse à nos enfants… c’est grâce à eux que nous construirons un « Notre Monde » pour demain!
    Au plaisir d’échanger! Bonne continuation! Aurélie (blog remèdes naturels)

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