Violence éducative ordinaire : la nommer pour mieux la combattre

Violence à l'enfant, violence à soi même.

Comprendre ce qu’est la violence éducative ordinaire

Il y a encore quelques années, on parlait peu de violence éducative ordinaire (VEO).
Le terme choque, dérange, met mal à l’aise. Pourtant, il ne désigne pas des violences exceptionnelles, mais celles que beaucoup d’entre nous avons connues, parfois reproduites, souvent sans en mesurer la portée : une gifle “pour son bien”, un cri “pour qu’il obéisse”, une punition “pour qu’il comprenne”.
Et si ces gestes et paroles, que nous croyons anodins, laissaient des traces profondes dans le cœur et le cerveau des enfants ?
Nommer ces violences, c’est le premier pas pour les transformer — en nous, dans nos écoles, dans nos familles.

La VEO désigne toutes les formes de violences physiques, verbales ou psychologiques utilisées à des fins éducatives :

  • coups, gifles, fessées, secousses, tirages de bras ou d’oreilles ;
  • menaces, humiliations, chantages affectifs, moqueries, isolements ;
  • privations, cris, ou même regards chargés de mépris.

Ces gestes et ces mots, sous couvert d’éducation, transmettent un message implicite :
“Tu n’as de valeur que si tu obéis.”
“Je peux te faire peur ou mal pour ton bien.”

Catherine Gueguen dans son livre Pour une enfance heureuse (2014) montre que les découvertes en neurosciences transforment radicalement notre compréhension de l’enfant. Son cerveau est immature, fragile, et dépend profondément de la qualité de la relation pour se développer harmonieusement. Les violences éducatives ordinaires – cris, menaces, punitions, humiliations – activent le stress toxique, bloquent les apprentissages et altèrent durablement la confiance en soi.

À l’inverse, une éducation fondée sur l’empathie, l’écoute et la coopération renforce les capacités émotionnelles, sociales et cognitives de l’enfant. L’auteure insiste sur l’importance du lien, de la sécurité affective et de la reconnaissance des émotions. Elle explique que poser un cadre peut se faire sans brutalité et que l’autorité n’a rien à voir avec la peur. L’adulte qui régule ses propres émotions devient un modèle puissant. L’enfant accompagné avec bienveillance développe une meilleure intelligence émotionnelle, une plus grande autonomie, et une envie naturelle de coopérer. Le message central : un climat relationnel apaisé et empathique est la condition la plus solide pour qu’un enfant devienne un adulte confiant, responsable et empathique à son tour.

Pourquoi il est si difficile de la reconnaître

a woman sitting on a swing with her legs crossed

Parce que la VEO est culturelle.
Elle s’enracine dans des siècles de croyances :

  • qu’un enfant doit “obéir” pour bien grandir ;
  • que la fermeté est la seule voie vers le respect ;
  • que “moi aussi j’en ai eu, et je ne m’en porte pas plus mal”.

Mais ce déni collectif est souvent une protection contre la douleur de ce que nous avons vécu.
Admettre qu’un mot, un geste de nos parents ou professeurs a pu être violent, c’est risquer de fissurer l’image rassurante de notre enfance.

Et pourtant, c’est en reconnaissant cette violence qu’on peut s’en libérer — et ne plus la transmettre.
Les adultes capables de dire “je me suis emporté, je t’ai fait peur, je regrette” ne perdent pas leur autorité : ils gagnent en humanité.

Éduquer sans violence : un apprentissage collectif

Combattre la violence éducative ordinaire, ce n’est pas devenir des parents ou des enseignants parfaits.
C’est désapprendre pour mieux reconstruire :

  • un cadre clair mais sans humiliation ;
  • des règles co-construites, expliquées, adaptées à l’âge ;
  • des conséquences réparatrices plutôt que des punitions ;
  • de l’écoute, de la présence, du soutien émotionnel.

Des approches comme l’éducation positive, la Communication NonViolente, ou côté scolaire la pédagogie Montessori ou les écoles démocratiques prouvent qu’on peut allier cadre et bienveillance, sans peur ni domination.
Changer la culture éducative demande du courage, mais c’est un acte politique : refuser la domination pour faire naître la coopération.

Conclusion 🌿

Nommer la violence éducative ordinaire, ce n’est pas accuser les parents ou les enseignants.
C’est reconnaître qu’une société qui frappe, humilie ou menace ses enfants ne peut pas prétendre bâtir un monde plus juste.
Changer d’éducation, c’est semer la paix dès l’enfance.


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